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Recherche / 25 mars 2025

Découverte du gène IDH3G : une avancée pour la rétinite pigmentaire liée à l’X

À l’Institut de la Vision, l’équipe dirigée par Isabelle Audo et Christina Zeitz a identifié un nouveau gène impliqué dans une forme rare de rétinite pigmentaire liée au chromosome X. Cette découverte, publiée dans Genetics in Medicine, ouvre de nouvelles perspectives pour le diagnostic et le développement de traitements ciblés.

Illustration de la position du gène IDH3G sur le chromosome X
Illustration de la position du gène IDH3G sur le chromosome X

La rétinite pigmentaire, une maladie génétique aux conséquences graves

La rétinite pigmentaire (RP) est une maladie héréditaire rare qui touche environ 1 personne sur 4 000. Elle entraîne une dégénérescence progressive des photorécepteurs (cellules de la rétine sensibles à la lumière), conduisant à une perte de la vision nocturne, puis à une restriction du champ visuel et, à terme, à la cécité. Les formes liées au chromosome X touchent principalement les hommes et représentent environ 15 % des cas de RP. 
Jusqu'à présent, seuls trois défauts génétiques (RPGR, RP2 et OFD1) ont été identifiés comme responsables de RP liée au chromosome X mais de nombreux cas inexpliqués laissaient supposer l'implication d'autres gènes.

Une percée scientifique majeure : le rôle clé du gène IDH3G

Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont identifié des mutations dans le gène IDH3G, situé sur le chromosome X, chez cinq patients atteints de RP liée à l'X, dont certains issus de la grande cohorte du centre de maladies rares de l’Hôpital national des 15-20. Ce gène code pour une sous-unité d'une enzyme essentielle à la production d'énergie dans les photorécepteurs de la rétine (appelée IDH3). Cette enzyme fonctionne dans les mitochondries, les centrales énergétiques des cellules. Si le gène IDH3G subit une mutation, l'enzyme ne fonctionne plus correctement, ce qui perturbe la production d'énergie dans ces cellules visuelles. Avec le temps, cela entraîne leur dégénérescence.

« Cette étude souligne l'importance du métabolisme mitochondrial dans la dégénérescence rétinienne. D’autres mutations dans les gènes IDH3 sont associées à la RP. Nos résultats révèlent l’implication d’une nouvelle sous-unité clé pour les photorécepteurs. Étonnamment, ces mutations entraînent une RP isolée sans affecter d’autres tissus, bien que ces gènes soient exprimés ailleurs. Ce phénomène pourrait dépendre du type de mutation (hypermorphe ou non) et souligne aussi l’importance de la demande métabolique essentielle pour l’homéostasie des photorécepteurs. Des études supplémentaires seront nécessaires pour explorer ces hypothèses. » Christina Zeitz.

 « L'implication de cette protéine essentielle pour la survie des photorécepteurs pourrait ouvrir la voie à de nouvelles pistes thérapeutiques ciblant la fonction mitochondriale. » Isabelle Audo.

Un enjeu crucial pour les patients

Les patients atteints de RP disposent aujourd’hui de peu d’options thérapeutiques. L’association de ce nouveau gène à la RP constitue un espoir pour améliorer le diagnostic génétique des formes inexpliquées de RP et orienter le développement de nouvelles approches thérapeutiques, notamment les thérapies géniques visant à compenser ou restaurer la défaillance du gène IDH3G

Dans ce contexte, cette découverte ouvre des perspectives thérapeutiques en s'inspirant des stratégies déjà explorées pour d'autres formes de RP. Certaines approches visent à corriger directement les défauts génétiques responsables, tandis que d'autres adressent des mécanismes communs de dégénérescence de façon indépendante de la cause génétique. Cibler le métabolisme mitochondrial, notamment via IDH3G, pourrait ainsi représenter une nouvelle piste prometteuse pour limiter la dégénérescence rétinienne.

Cette avancée s'inscrit dans une dynamique de découvertes majeures : moins d’un an auparavant, l’équipe d’Isabelle Audo et Christina Zeitz ont identifié le gène UBAP1L, dont les mutations sont impliquées dans certaines dystrophies rétiniennes d’origine génétique. Grâce à leurs travaux, la recherche progresse pour mieux comprendre et contrer les mécanismes responsables de la dégénérescence de la rétine

Réf. : Lorenzo Bianco et al, "Identification of IDH3G, encoding the gamma subunit of mitochondrial isocitrate dehydrogenase, as a novel candidate gene for X-linked retinitis pigmentosa" - Genetics in Medicine, 2025

Lien pour l’abstract : https://www.gimjournal.org/article/S1098-3600(25)00065-6/abstract

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L'étude a été menée par une équipe de chercheurs issus de l'Institut de la Vision (Sorbonne Université, Inserm, CNRS) et de l’Hôpital national des 15-20. Elle a été réalisée en collaboration avec l'Institut des Neurosciences de Montpellier et le CHU de Montpellier, le CHU de Lille, et avec des collaborations internationales incluant le Département d'ophtalmologie de l'Institut San Raffaele à Milan, le Ocular Genomics Institute de la Harvard Medical School à Boston, l'Université arabe de Beyrouth et l'Université de Pittsburgh, sous la direction d’Isabelle Audo et Christina Zeitz.